L’automatisation réinventée par l’IA agentique : une évolution, pas une révolution

Par
Sarah Legendre Bilodeau, 14 octobre 2025
IA agentique
Automatisation intelligente
Création de valeur

Je mets la table tout de suite : je vais peut-être surprendre quelques personnes! Je vais parler d’IA agentique, mais pas comme d'une révolution. Pour moi, c’est le fruit d’une évolution amorcée il y a déjà plusieurs années. Voici pourquoi je dis ça...  

L’automatisation est bien ancrée dans le monde de l’entreprise. Depuis des années, on utilise des outils pour simplifier les processus répétitifs, comme le RPA (Robotic Process Automation), qui suit des règles prédéfinies pour effectuer des tâches. Ces systèmes sont fiables, mais aussi très rigides. Si le processus change, même légèrement, il faut reconfigurer le robot, ce qui peut prendre du temps et occasionner des coûts.

Aujourd’hui, l’IA agentique émerge comme une nouvelle étape dans cette évolution.


Qu’est-ce que l’IA agentique?

Imaginez un assistant capable d’exécuter des tâches complexes de manière autonome et de prendre des décisions sans supervision. C’est exactement le principe de l’IA agentique.

Ces agents ne se contentent pas d’appliquer des règles : ils interagissent en langage naturel, accèdent à des bases de données et adaptent leurs actions en fonction du contexte, un peu comme le ferait un collaborateur humain.

Un exemple concret? Dans le secteur de l’assurance, un agent peut analyser un courriel de réclamation d’un client, vérifier le numéro de dossier, consulter les politiques de l’entreprise et même traiter la réclamation si elle est légitime. Tout cela, du début à la fin, sans intervention humaine.


Une évolution progressive, pas une révolution soudaine

L’IA agentique n’est pas sortie de nulle part. Elle est l’aboutissement de plusieurs vagues d’innovations :

  • Le RPA, qui a ouvert la voie en automatisant les tâches basées sur des règles d’affaires.
  • L’apprentissage automatique, qui a apporté prédiction et détection.
  • L’IA générative, qui a permis aux systèmes de communiquer et de raisonner en langage naturel.

L’IA agentique combine ces approches pour créer des assistants intelligents, flexibles et capables d’orchestrer des processus de A à Z.

Un exemple concret : la Banque Scotia. Dans son article intitulé « L’IA agentique : la “prochaine grande innovation” en intelligence artificielle », la banque détaille comment elle est passée progressivement d'une solution d'IA plus traditionnelle à l’IA agentique  (L’IA agentique: la «prochaine grande innovation» en intelligence artificielle | perspectives).


Voici les étapes clés du processus :

  1. Phase expérimentale (2018 – 2022) : développement interne de AIDox, un outil d’analyse de documents, d’abord utilisé pour des tâches simples (ex. confirmation de lettres d’assurance).
  1. Phase d’industrialisation (2023) : déploiement d’AIDox dans les Services bancaires commerciaux, enrichi de données métier spécifiques pour gagner en précision et en pertinence.
  1. Phase agentique (2025) :  intégration de capacités d’IA agentique permettant de traiter automatiquement les courriels clients, d’acheminer les dossiers vers les bonnes équipes et de créer des entrées dans les systèmes internes. Résultat : délais réduits de plusieurs heures à quelques minutes, 90 % des 1 500 courriels traités par jour, et redéploiement de 70 % du personnel vers des tâches à plus forte valeur.

De la commodité à la création de valeur

Dans un précédent article, j’expliquais la différence entre une IA de commodité et une IA de valeur. Cette distinction est essentielle pour comprendre l’IA agentique.

  • IA de commodité : des outils comme Gemini, ChatGPT ou Copilot, qui facilitent le quotidien (ex. génération de texte, suggestions, aides à la rédaction).
  • Une IA de valeur : des solutions complètes qui transforment les processus et créent un réel avantage compétitif (par exemple, un agent qui gère un processus d’affaires de bout en bout).

C’est là que l’IA agentique prend tout son sens : elle ne doit pas être perçue comme un simple gadget technologique, mais comme un levier stratégique pour réinventer la manière dont les entreprises créent de la valeur.


Bien sûr, cette puissance s’accompagne de nouveaux défis. Contrairement au RPA, qui est déterministe, l’IA agentique fonctionne sur des modèles probabilistes : elle peut donc se tromper. C’est pourquoi il est crucial de mettre en place des garde-fous et des mécanismes de supervision.


L’IA agentique : une intégration progressive

Le déploiement de l’IA agentique dans une entreprise est un processus graduel. Surtout quand on pense à des entreprises qui ne sont pas natives numériques... On ne passe pas d’une automatisation simple à un système multi-agents complexe du jour au lendemain.

Historiquement, l’IA générative s’est d’abord concentrée sur la création de contenu (texte, images, etc.). L’IA agentique représente la prochaine étape, en permettant aux modèles de langage d’interagir avec des outils pour accomplir des tâches concrètes. Cette approche progressive aide les entreprises à s’adapter et à gérer les risques liés à cette technologie.

Certes, l’IA agentique est plus flexible que le RPA, mais aussi plus complexe. Elle peut commettre des erreurs, ce qui rend indispensable la mise en place de contrôles rigoureux. En revanche, elle ouvre une opportunité unique : la réutilisation d’agents spécialisés. Une fois développés, ces agents peuvent être adaptés et partagés entre équipes et fonctions, accélérant l’automatisation à grande échelle.


En résumé

L’IA agentique ne doit pas être perçue comme une rupture brutale, mais comme la suite logique d’un parcours déjà amorcé : du RPA aux modèles prédictifs, puis à l’IA générative. Elle marque le passage d’une automatisation de commodité à une automatisation de valeur, capable de transformer en profondeur les modèles opérationnels des entreprises.